< PreviousPage • 40 • MiscellanéesRonda Lewis La marguerite Flashback d’un samedi Il y a quelques années,Ou bien il y a quelques décennies. Un champ de marguerites Brillant dans la lumière chaleureuse du mai. J’en ai gardé une pour la placer dans un album J’avais compté ses pétales… Passionnément avant deL’entourer des photos dansMon livre d’enfanceUn moment joyeux, paisibleOrdinaire. J’ai retrouvé l’album aujourd’huiJ’ai découvert la folie douce des grandeurs chez les petits, et entre les pages Pas une marguerite – une pâquerette J’imaginais les pétales Maintenant trop petits pour compter Alors l’esprit adulte a fait appel à Fibonacci et j’ai choisi Le chiffre huit, pas assez Chez le fleuriste J’ai commandé un bouquet De cinquante-six Placées partoutDans des vases Par terreUn champ de fleurs Prêt à accueillir mes invitésAu milieu – une carafe de MargaritaJean et Susanne, un verre à la main Soulevaient haut leurs jambes Des gambades Entre les pétales Qu’ils comptaient… à la folieOn a pique-niqué au sol fraisUn rire chaleureux retentit. Entretien • Page • 41Hervé DUVAL, Emergents - 2016Page • 42 •EntretienRencontre avec Hervé DuvalPar Patrick Fourets et Ronda LewisHervé Duval n’est pas un artiste classique. C’est plutôt un artiste à la “marou’fleur”. Le mot est peut-être inventé, mais Hervé est un mélange d’artisan-artiste-inventeur, il faut donc une nouvelle description. Si le spectateur se concentre sur l’image du tableau devant lui, Hervé voit également l’interaction entre les différents éléments – autant matériels que picturaux. A partir d’une technique de peinture sur papier, Hervé utilise pour ses réalisations des outils de bricolage, comme la ponceuse, et des matériaux comme des épaisseurs d’affiches publicitaires. Son inventivité, sa manière de sortir du cadre classique de réalisation picturale, rejaillissent sur son travail et créent un tableau vivant et dynamique, voire mystique : les émergents, un terme qui décrit sa philosophie technique ainsi que les formes qui se dégagent du fond de la toile. Nous avons eu la chance de passer un après-midi avec Hervé dans son atelier au premier étage du Fort de Cormeilles, un fort du 19ème siècle, au milieu d’un terrain emmuré, enneigé, loin du bruit citadin, un espace partagé avec d’autres artistes… et des poules. L’art vient à sa rencontre dans un village reculé des Côtes-d’Armor, où ses parents tiennent une boulangerie. Il y a souvent beaucoup d’invités à la table familiale. Viennent s’y asseoir deux artistes qui lui parlent et partagent leurs expériences et leur vision d’une autre façon de voir et de vivre. Périodes de doutes et de vie professionnelle pleine de rebondissements l’amènent par jeu de rencontres, à l’étude de l’histoire de l’art en complément de son travail artistique personnel. Il définit quatre périodes de créativité distinctes. Celle des primitives, puis le travail de quadrillages effectués à la plume de goéland, ensuite une transcription personnelle des « indulgences » – pratique chrétienne du Moyen Âge – enfin, lors de la quatrième période, un travail qui dure une dizaine d’années sur « Les émergents » dont le cycle s’achève. Vous avez dit que vous travaillez sur plusieurs tableaux en même temps ? Je suis obligé en raison du temps de séchage de la peinture à l’huile. Ma technique nécessite un séchage entre chaque couche. Les rouges et jaunes prennent beaucoup de temps pour sécher. Je travaille toujours sur plusieurs toiles à différents niveaux d’achèvement, je les mets au sol, ce qui me permet d’interagir plus facilement avec le support. Aujourd’hui ce n’est pas un bon exemple parce que j’ai dû ranger pour une porte ouverte le week-end prochain. Je viens de terminer une série, les derniers tableaux sont au bout là-bas. Voici Entretien • Page • 43le dernier que je viens de maroufler (maroufler : technique où on utilise une maroufle pour chasser les bulles d’air pour une adhérence à 100% lorsqu’on colle un papier sur un support). Voici le type de papier que j’ai récupéré chez un imprimeur (il nous montre une grande feuille, presque du carton, un essai balancé par l’imprimeur). J’aime l’idée d’un éventuel effet de palimpseste. La surface de tes tableaux offre une texture intéressante. Par endroits, on dirait presque l’écorce d’un arbre, puis ailleurs une surface lisse comme une pierre, ce qui ajoute un jeu de lumière sur la surface. Pouvez-vous expliquer votre technique ? Je peins sur du papier dit « couché » car il est couvert d’une couche de calcaire (kaolin) qui protège les fibres. J’y mets une couche de peinture puis je couvre le tout avec une autre feuille et je les laisse reposer. Quand j’enlève la feuille, la peinture réagit et crée des formes fluides qui deviendront les premiers éléments. Après chaque couche de peinture, je ponce, j’enlève, je protège avec un vernis, puis une autre couche de peinture. Petit à petit, une couleur imbibe et entre dans l’autre, y inclut le calcaire… il y a des formes qui émergent, d’où le nom donné aux séries : « Les émergents ». Le jeu de reflets donne une profondeur à la scène. Alors vous n’êtes pas un peintre abstrait ? Je suis loin du réalisme comme vous le voyez, mais le corps est toujours présent, plus ou moins lisible et je cherche une idée d’espace. J’ai commencé par la peinture figurative, puis très vite je me suis intéressé aux arts primitifs, amérindiens, océaniens, africains… et cela m’a fait reconsidérer le rôle de la peinture, non plus rendre le visible mais rendre visible comme le préconisait Paul Klee. Comment vous décidez-vous sur une série ? C’est souvent un accident, un truc que j’observe et je me dis, tiens c’est intéressant. Ici c’était une série où j’ai commencé par tout recouvrir pour partir en recherche du visuel caché, le découvrant carrément avec la ponceuse. Un soir, par un accident heureux, j’ai découvert cette technique qui m’a ouvert à un nouveau rapport avec la matière. J’essaie de rester à l’écoute des matériaux.Il y a de l’épaisseur. Si vous touchez là, il y a du grain. J’utilise une peinture que je fabrique moi-même avec de la poudre de marbre pour donner du corps à la peinture. Cela aide la peinture à ne pas s’affaisser quand je travaille sur la surface. Ici on voit un être humain qui peut être aussi, un oiseau – et il danse – une présence joyeuse à la scène. Il semble se promener ou découvrir quelque chose que nous ne voyons pas. Peut-être que c’est nous qu’il découvre, le spectateur ! En tout cas, nous sommes face à un moment d’existence. Pensez-vous à une histoire quand vous peignez ?Page • 44 •EntretienNon. J’évite ce genre de filtre, mais j’y pense une fois que je l’ai fait. Un dessin me donne le départ, je suis en semi-automatique et j’essaie de rester dans cet état, alors je finis très fatigué après une séance. Je travaille avec la musique au casque, parfois sans regarder le support, c’est un état d’hypersensibilité. Je dois rester ouvert à la découverte au risque de la couvrir ou de l’effacer. Dans la bande dessinée japonaise, les graphistes ont une case, ou une vignette, une image délimitée par un cadre, où ils dessinent un moment dans le temps, un état d’être qui donne un ton ou un sens au personnage ou au moment. Parfois vos tableaux semblent exprimer ce même moment « hors temps », ou plutôt, « hors histoire linéaire ». Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais un soir, quand j’habitais en Bretagne, en 96, je me baladais au bord de la mer et j’ai ramassé des plumes de goéland que j’ai taillées. Je voulais voir l’effet produit en les utilisant avec de l’encre. Je rentrais et je commençais à faire des lignes horizontales et verticales. Il n’y avait rien de préétabli, de préréfléchi. J’étais intrigué et ça a duré pendant dix ans. Il y a aussi ce corps qui ressort toujours, qui s’exprime, qui danse, parfois fracturé. Vous êtes aussi professeur d’art plastique…Je suis professeur depuis une vingtaine d’années. Peintre autodidacte, j’ai commencé des études d’Arts Plastiques à l’Université Paris VIII à 27 ans. Cette université acceptait les étudiants non bacheliers et j’y suis resté quatre ans, étudiant l’histoire de l’art avec des professeurs passionnants comme Pascal Bonafoux, Jean-Luc Chalumeau, Giovanni Joppolo… J’y ai découvert la gravure grâce à Yoha Milshtein et Zhang Jun. Judith Wolfe, professeur de peinture, m’a donné confiance en moi.Le diplôme obtenu m’a permis de passer le concours pour devenir professeur et depuis je partage mon temps entre mon atelier et le collège.C’est marrant, les gens ont souvent l’idée reçue qu’il faut se servir d’un pinceau et de matériaux chers. Dans ma pratique et avec mes élèves, j’expérimente avec toutes sortes d’objets, les moyens du bord ! Parfois les vieux matériaux, comme une plume de goéland, un morceau de bois… mon doigt ! Tout offre un rendu différent. Comme j’ai dit à un élève, « l’inspiration ne vient pas à celui qui attend », il faut aller en avant : expérimenter, taire le filtre qui juge, rester au guet. Cartes blanches • Page • 45Hervé DUVAL, Emergent - 2017Page • 46 • Cartes blanchesCarte blanche à Jean-Paul Gavard-PerretCendres Lavy dans les plisCendres Lavy, Palais de Tokyo, 16-18 mars 2018, Paris Ass Book Fair – et Maison Dagoit, Rouen.Dans les œuvres plastiques de Cendres Lavy les corps flamboient par ce qu’ils donnent et jouent dans divers types d’échanges. Ils évitent toute annihilation physique et en conséquence mentale. La figure féminine – souvent nue – se répand et s’épanche en tant que sujet de désir et parfois objet de domination. Mais elle transgresse autant la puissance du mâle que tous les édits de chasteté. Les femmes affichent leurs prestances, leurs formes généreuses et leurs forces d’exception. Parfois elles les dissimulent sous le strass. Mais c’est un piège de la puissance qui toise la mollesse des mâles. Cela tient d’une jouissance. Néan-moins le centre des mystères n’est plus le dévoilement du « phallos ». Soulever le rideau ou le voile ouvre sur un chaos coloré où la démone refuse le maso-chisme et la passivité.Il se peut même qu’à l’heure de la sieste la gorgone orgiaque s’accroupisse sur le sexe dressé des dormeurs. Elle devient même la sphinge qui vampirise les endormis. Ses caresses libidinales, temporelles et causales ignorent la morale qui voudrait les limiter. En usant de son érotisme charnel pour élever le désir, la femme s’offre à elle-même la volupté sans même déranger ceux qui poussent des cris d’orfraie. C’est donc bien là la naissance de Vénus et qu’importe si les rêveurs ont pour maison leur passé. Au contraire même. L’artiste leur rappelle que leur plus obs-cur passé est dans l’origine invaginée. Si bien que le dernier des « amorphos » ne peut qu’être réveillé à l’insu de son plein gré. Il y a soudain deux corps qui se mettent à parler sinon le langage de l’amour du moins celui du plaisir. Le sexuel se manifeste en tant que dilution de l’incomplétude dans la violence de l’acte et pour le plaisir. La monstration des organes en devient la preuve irréfutable. L’existence reçoit son sens, sa vérité et sa réalité loin d’un fondement supérieur. La femme quitte la terre mouvante, le sable et la nuit accrochés aux mytholo-gies du féminin pour trouver le roc, l’argile et le soleil. Elle existe pleinement et foule une terre ferme. Plus besoin d’attendre d’un tiers et à chaque instant une nouvelle confirmation de son existence. Voir et montrer permet tout empêche-ment à la contestation de son existence. Cartes blanches • Page • 47Cendres Lavy retrouve les ressources de la nature inaliénable de la femme. Elle la re-légitime, sort de la culpabilité que les hommes ont accordée à Eve. L’artiste rend la vie plus réelle. Elle lui donne son passage. Mais ses images de couples rappellent aussi que l’on n’existe pas que par soi. Un être ne peut pas conquérir le droit d’exister sans le secours d’un autre, qu’il et qui le fait exister. D’où le rôle de « l’avocate » Cendres Lavy. Par ses « plaidoiries » visuelles elle intensifie la réalité des existences et lutte en faveur de nouveaux droits des femmes. Car c’est bien une question de droit. Mais cela reste plus que jamais la question de l’art : par quels « gestes » instaurateurs les existences parviennent-elles à se « poser » légitimement ?L’incertitude des corps simples selon les Sœurs H Les Sœurs H créent des installations vidéos et sonores. Isabelle est vidéaste, Marie pratique l’écriture dramatique. Elles mixent leurs arts au sein de mon-tages narratifs hybrides entre les arts visuels et la forme scénique. Leur sujet en est la transformation et les expérimentations sur les incertitudes identitaires, leurs tentatives, leurs échecs et le rêve d’un avenir à soi.Les deux créatrices décalent la réalité ; l’image avec inserts, le son imposent un univers particulier comme dans « Même dans mes rêves les plus flous tu es toujours là à me hanter, Jean-Luc » ou « Je ne vois de mon avenir que le mur de la cuisine au papier peint défraîchi » et récemment « Tumulte ». Cette propo-sition situe parfaitement les recherches des deux créatrices au sein du passage trouble entre l’enfance et l’adolescence et l’interrogation qu’il suscite.Inventant leur propre grammaire visuelle et sonore les Sœurs H montrent et font entendre ce qui sourd et jamais ne fait surface au sein d’un univers tour à tour, proche et lointain. Il s’agit d’inventer le regard. De glisser à la surface des volumes. Sans rien expliquer ou revendiquer mais à travers la cloison fragile et transparente du réel, s’immisce une vision qui permet d’atteindre le fond du lisible en brouillant toute structure du discours par enjambements et ruptures selon une expérience du temps, de l’espace, de la mémoire. Et ce au sein d’une théâtralisation d’un sens à peine formulable.De l’incompréhensible l’œuvre présente une nouvelle expérience inaugurale de la lisibilité là où créer devient l’apparition des germes d’un sens à venir là où l’image reste celle de l’inachèvement cher à Blanchot dans un travail où l’« à peine, à peine » (Beckett) travaille les tréfonds de notre esprit dans une forme d’oblitération consentie mais qui ne se contente pas de la négation – bien au contraire.Page • 48 • Cartes blanchesLes idées « Forte »En forme d’hommage aux albums du groupe Deerhoof, dont le titre de son livre est un « à peu près », Fréderic Forte crée un acquiescement insolite au monde qui se dérobe ou qu’il faut éclaircir. Par tous les angles du livre il s’agit d’apprivoiser la surface du réel et la percer par déplacement de l’objectif de langage poétique. Le poème crée une fiction sèche. Une nudité nouvelle voit le jour avec avertissement à son vacarme. L’image (poétique et à la fin visuelle) retient dans la dispersion de poussières narratives. Au besoin le livre avance par « découragements ». Mais – Zorro ou non – l’auteur zèbre le discours, page après page. Il progresse à travers la musique. En morceaux. Le texte plie et déplie, pend, se repent. Pas à pas « Lapinou gran-dit ». Jusqu’à ce qu’en fin de texte les pensées aillent par deux et se doublent de vignettes. Chaque partie de Dire ouf devient une scène. Le corps en sort. Un détournement musical est là pour effacer la douleur. Existe l’éloignement de la proie pour l’ombre de manière ironique – avec en sus l’apprentissage de l’énigme par attention à l’infime comme au slogan, qui le dénature.En période de creux et de vieillerie, loin des visions archaïques, le texte devient cavalcade. S’y effectuent de grands moulinets « dans le style Pete Townsend » – les amateurs de la musique rock et des Who comprendront – et c’est ce que rappelle l’auteur. Hertzien, le poème transmute la musique en texte, met « un truc dans le machin ». Et qu’importe si dans le jardin de l’être il pleut : dans la maison du livre il n’en va pas de même. Le lecteur, pieds mouillés, s’y sent bien.Dire ouf, de Frédéric Forte, P.O.L éditions, 2016Le secretÉcrire t’écrire est trop souvent et paradoxalement au-dessus de mes forces. Reste le trajet du noir sur page blanche. Le Silence en sera le terme – mais la voix ne renonce jamais. L’entends-tu encore ? L’entends-tu à l’heure où tu sais tout du silence et du reste ? Certes un jour les voix croisées cesseront. Mais peu importe. L’un de nous ne sera plus là pour le savoir. Les mots soudain ne sont plus affaire de peau, de « peaurnographie ». Ils sont déjà moins que des fragments, guère plus que des escarbilles. Au bout du bout : pas d’autres choix que de se taire. Sur la terre noire des talus où au printemps vrombit le violet des iris. Qui parle encore au sein de notre silence ? Ce qu’il y a d’élémentaire est ruminé loin de rognures. Il y a cette ascèse où le corps tente de soupirer pourtant jusqu’à l’obscène. Toucher ainsi à ce qu’on cherche : mais qu’en est-il de l’issue ? Écrire – t’écrire – n’est donc plus – fatalement – mettre de l’ordre, mais entrer dans le silence Cartes blanches • Page • 49au moment de la plus grande fatigue, à cette « croisée » impossible de nos chemins. L’encre, comme l’eau, a encore parfois envie de courir, de partir en filet : mais il faut comprendre que tout se joue ailleurs. Dans l’écriture rien ne coule « de source » elle est la perte qui ramène – toujours – en son noir profond une res-piration. Soudain la lune devient un soleil noir, un soleil qui par pudeur se cache. Il y va encore d’une dérobade au moment de la plus grande retenue. Reste cet appât de la vie : l’écriture le lance et à la fois le récuse. Je remonte l’histoire – du moins ce qu’il en reste. Je scrute l’absence à laquelle l’écriture renvoie en absence de matière propre comme essence même de la matière-à-dire. C’est là. En noir : sans quoi qui creuserait la peur ? Il est sa vibration. Il porte en lui le désir et le silence en écho. Voir dessous ce qui arrive, ce qui reste : le nécessaire dégorgement de ce qu’on garde en soi. L’absence est aussi la matière à dire. C’est là, ça n’a jamais été. Faille et présence. Trou du silence que l’écriture ne peut jamais combler : elle en dessine au mieux parfois le rebord. Face au fantasme de réalité surgit cette fiction noire, dure. Paradoxalement « avec » toi je ne suis hors du monde : je suis dedans. Face au silence, face à toi.Les Femmes de Madame Edwarda (Hommage à Bataille)Par les séquestrées de Madame Edwarda gainées de latex près du caniveau de la rue Saint-Denis, monte la musique de l’orgasme des mâles. Leur prestidigita-tion rend leurs derviches tourneurs.Réduites par le commun des mortelles au rang de butineuses de foutre, les pé-ripatéticiennes par leurs fellations pourpres font d’elles les héritières de Marie Madeleine. L’angoisse qui rend le phallus inerte est rompue. Soudain sur la bouche de l’Histoire Sainte se prolonge par les flemmes de l’imposture des mâles qui demandent aux femmes l’agilité d’un fakir. Dans la rumeur du bordel, se gravissent pour elles les quatorze étapes du che-min de croix. Car Madame Edwarda attire les laquais de Dieu et les transfusés de la foi. Ils se méprennent autant sur leurs officiantes que sur le peu qu’ils sont. Mais il n’existe pas de repos pour les prêtresses : juste le rouge et le noir, la bles-sure et le spasme, la beauté montée sur talons aiguilles, les tailleurs de larmes, et les cils en râteau pour jardiner les nuages afin d’oublier ce qui se passe ou ce qui semble n’avoir pas d’arrêt ni concevoir de terme.Next >