Le Havre. Samedi 11 février 2012
Odile, notre amie amiénoise, alors que nous défendions l’esthétisme de la Tour Perret si décriée par beaucoup de Picard, nous fit remarquer que Le Havre était la plus grande, immense, réalisation d’Auguste Perret, premier architecte à saisir l’intérêt du béton armé. Puis nous avons vu «le Havre» d’Aki Kaurismäki. «Le Havre» est un de ces films qui donnent envie de voyager. Touchés par ce conte moderne, par la générosité modeste et populaire des personnages, par la simplicité de la ville, nous avons eu subitement l’envie de la découvrir et de ressentir ce qu’Auguste Perret avait bâti. Une brève lecture du site de l’office de tourisme nous fit découvrir, surprise, que Le Havre avait été inscrit au patrimoine mondial par l’UNESCO ! Dire que pour nous, comme tant d’autres, c’était synonyme d’un port industriel, de zones tout aussi industrielles, de chimie lourde qui plus est, d’une fin de Seine en déclin comme la navigation fluviale et l’industrie réunies.
Profitant d’une lumineuse journée d’hiver, enneigée, nous y voici donc enfin. Plein centre. Dans le coeur des ilots Perret. Larges avenues (malgré des perspectives brouillées par les travaux du tramway – mise en route fin 2012) bordées par les façades sobres et fonctionnelles des immeubles. Cela a vraiment de l’allure. La rationalité est évidente. En cette matinée lumineuse l’orientation est-ouest de tous les appartements saute aux yeux. Extérieurs ouverts sur les avenues, Intérieurs collégiaux des cours. L’urbanisme est instinctivement palpable, lisible. Vers l’ouest, une large artère, l’avenue Foch, mène à l’océan et à la plage : la Porte Océane. Vers le sud, une autre, la rue de Paris, nous guide vers le port industriel. Le Havre respire la mer. «Toute la mer va vers la ville» disait Emile Verhaeren. Ici c’est particulièrement vrai. La ville respire l’iode. Plage et «bassins» sont reliés par un large boulevard maritime longeant les ports de plaisance et centres de voiles. Malgré le froid, des promeneurs se soulent de grand large. Et, pour un samedi, un trafic maritime permanent : Bateaux pilotes, porte-conteneurs, cargos…
Au centre de cette urbanisation fonctionnelle, dans le même style, tel un phare, un clocher, un minaret : la tour lanterne de l’église Saint-Joseph. Elle nous a immédiatement conquise par l’élégance verticale et dépouillée du béton brut, par la lumineuse gaieté de milliers de verres colorés qui filtrent le soleil et réchauffent le coeur octogonal. Un joyau architectural.
Le Havre, ville de culture. Nous n’avons pu que l’effleurer. Le «Volcan» centre culturel était fermé pour cause de travaux. Mais nous avons longuement savouré le Musée André Malraux. Riche collection d’art moderne, de l’impressionnisme (Monet, Manet, Pissarro), du fauvisme au cubisme avec Albert Jacquet, Georges Braque, Raoul Dufy. Et surtout nous avons découvert une incroyable collection de tableaux d’Eugène Boudin, dont une invraisemblable collection de vaches normandes, complètement décalées dans le décor dépouillé, lumineux, spacieux du musée, construit lui-aussi par deux élèves de Perret et partie intégrante d’un des plus grand projet d’urbanisme moderne que nous ayons vu.
De quoi nous donner l’envie de séjourner quelques jours au Havre, pour y rencontrer, la prochaine fois, la si généreuse humanité du film «Le Havre».
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