Abris ronds, les caches misères.

Nous revenons d’une semaine dans le Lubéron, cette région qui abrite aujourd’hui les gens les plus riches que ce soit le temps d’un week-end ou celui d’une retraite aisée. Paradoxalement, en ces jours de fraîcheur nous y avons logé dans une borie rustique, spartiate, que nous avaient prêtées des amis. Non pas une ruine restaurée en palace, mais une authentique borie juste un peu aménagée. 2 corps perpendiculaires, trapus, ronds, empilements de pierres ramassées sur place par les laboureurs quand la charrue exhumait ces cailloux d’une terre difficile. Abris sommaires réservés en partie aux animaux, en partie aux hommes, aux paysans, métayers, bergers, qui trimaient pour les riches propriétaires. Ceux-ci logeaient dans de confortables et imposants mas ou dans les maisons du village perché voisin, Gordes en l’occurence.

Borie

Notre borie comportait une salle de vie à la température tout juste adoucie par une cheminée qui refoulait assez souvent la fumée. Nous dormions dans l’ancien four à pain, petite pièce tout aussi ronde mais facile à chauffer. Malgré ce relatif inconfort, nous étions isolés dans un cadre splendide et à bon port pour profiter de la luminosité de l’hiver provençal. Ce bref séjour était pour nous autres, citadins, une bonne occasion de se vider la tête et de se reposer loin de la promiscuité des villes. Un inconfort accepté pour notre plaisir pendant une courte période.

En rentrant et en feuilletant nos photos de vacances, je suis tombé sur quelques photos d’habitats rustiques, d’abris réservés aux plus pauvres des campagnes du monde. Borie de Provence, orri en Ariège, borniotte dans le Morvan. Toujours le même principe. Construction sommaire, minimale faite avec les matériaux du bord. La forme ronde est simple à construire et le retrécissement de la circonférence de chaque couche permet, sans poutre de concevoir un toit solide. Une seule ouverture, la porte.

Il m’était arrivé, il y a longtemps, pris dans une tempête sur le Mont Vallier, en Ariège, de construire, sur le même principe un igloo. De quoi attendre, pendant une randonnée en ski, que la visibilité revienne et le vent tombe.

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Il y a deux ans, nous nous étions protégés du soleil dans les tikits mauritaniens.Là encore, autour de la maison construite par les propriétaires à l’ombre et la fraîcheur de la palmeraie, les basses castes protégeaient un peu leur misère dans ses abris simplissimes. Les pierres, inexistantes dans le sable, étaient remplacées par les feuilles des palmiers qui protégeaient de la chaleur torride.

Hélas, en ce début d’année, loin de mes voyages, près de chez-moi, je retrouve des abris aussi sommaires, aussi ronds, à la porte unique, dans les tentes igloos que l’on distribue aujourd’hui aux cerfs de notre société appelés pudiquement travailleurs pauvres ou aux laissés pour compte appelés SDF.

Inconfort inacceptable.