Le Goncourt d’Yvon Le Men

Au ciel et bien sur terre, c’est l’état d’esprit qui fut le nôtre (la petite délégation de «Chant manuel 1») pendant cette soirée du 20 mai à la Maison de la Poésie, où Tahar Ben Jelloun et Virginie Despentes, jurés de l’Académie Goncourt, présentaient le lauréat du Goncourt de la Poésie, Yvon Le Men.
Cela avait commencé par un WAOOOHH de Chantal quand nous avions reçu le 7 mai en fin de matinée ce SMS de l’autre Chantal : « Yvon reçoit le Goncourt de la poésie ce midi, pour l’ensemble de son œuvre ».
C’est peut-être par raison prémonitoire que s’attardaient depuis quelques mois sur notre table de salon « un cri fendu en mille », ainsi que « Les rumeurs de Babel » et « Aux marches de Bretagne » 2, deux recueils magnifiquement illustrés — assez pour intriguer le visiteur, l’inciter à feuilleter, l’accrocher à quelques vers limpides, lui déclamer un chapitre engagé, et l’inciter à commander illico les ouvrages.
Face à un exemplaire désormais ceint du bandeau rouge « Goncourt 2019 de la Poésie », ce que Tahar Ben Jelloun mis en avant ce soir là, c’est l’engagement d’Yvon dans la poésie, c’est la justesse de textes ancrés dans la réalité, celle des terres et des hommes qu’il écoute et raconte (c’est le cas dans ces deux derniers recueils, Babel et Bretagne, qui nous plongent l’un à Maurepas, cité urbaine, l’autre dans le Coglais, campagne profonde) ou qu’il saisit en juste quelques vers (comme dans la trilogie « Les continents sont des radeaux perdus 3» éditée par Bruno Doucey).
Merci Tahar Ben Jelloun d’avoir longtemps promu, défendu l’œuvre d’Yvon Le Men. Merci de ce bel hommage que nous avions écouté le jour même et que vous avez renouvelé ce soir-là. Mais il y manque ce qui fait que j’aime particulièrement les poèmes d’Yvon Le Men, qu’il est si facile de les partager, d’en faire des ambassadeurs de la poésie : il y manque l’hommage à leur simplicité. Le mot, les mots et leur musique, simples, naturels, justes, qui nous touchent.
Après l’entretien mené par Virginie Despentes qui sut mettre en avant la singularité de cette vie entièrement vouée à écrire mais aussi lire et faire partager la poésie des autres et d’ailleurs, vint enfin une heure de lecture inspirée où la sincérité, la sensibilité de la poésie d’Yvon, tout simplement la beauté envahit la Maison de la Poésie.

Une heure de connivence avec ceux qui comme nous, comblés, s’associaient à cette reconnaissance.

Il était une fois, un autre jour, dans un autre monde. Nous allions dans ce monde où il était une fois.


  1. Chant manuel, l’association qui accompagne Yvon Le Men dans l’organisation de « Il fait un temps de poème », les invitations littéraires de Lannion, et qui gère aussi les différentes performances poétiques qu’il mène à droite et à gauche, comme celles qu’il anima pendant cinq ans à Achères : « Entre ciel et terre, des écrivains à la bibliothèque ».
  2. Deux recueils, publiés aux éditions Dialogues ; 2016 et 2018.
  3. Une île en terre ; Le poids d’un nuage ; Un cri fendu en mille ; trois tomes aux éditions Bruno Doucey ; 2016, 2017, 2018